La création en 1855 de la première galerie publique d’anthropologie en Europe au Muséum d’histoire naturelle de Paris sous l’impulsion du médecin et anatomiste Étienne Serres (1786-1868), marque un tournant majeur dans l’histoire de l’anthropologie. Nommé à la tête de la chaire d’anthropologie en 1838, Serres explique que c’est grâce aux collections de moulages corporels que la fondation de cette galerie et l’instauration de l’anthropologie comme discipline ont pu conjointement se réaliser. Ce musée constitue ainsi une étude de cas particulièrement probante pour comprendre comment la constitution de ces collections a effectivement permis de fonder la discipline anthropologique, mais aussi de quelle manière l’agencement visuel de ces artefacts dans la galerie publique d’anthropologie a participé à la mise en œuvre d’une conception hiérarchique de l’humanité. Cette recherche s’appuie ainsi sur le postulat selon lequel les muséums au XIXe siècle s’affirment comme des espaces d’autorité matérielle, et s’articule autour de deux problématiques : dans quelle mesure les séries des moulages corporels ont-elles déterminé les orientations théoriques et méthodologiques de l’anthropologie ? Et quels changements paradigmatiques dans l’histoire des savoirs sur l’homme, ces artefacts ont-ils provoqués ?